Contexte
Il aura fallu attendre 50 ans avant que la route de contournement de Cheseaux-sur-Lausanne soit enfin réalisée et inaugurée en 2001. Dans un premier temps, les travaux avaient permis de réduire considérablement le trafic de transit puisqu’au centre du village, le trafic journalier moyen (TJM) avait passé de 28’000 à 5’000 véhicules.
Les problèmes de circulation semblaient résolus avant que des bouchons ne se forment rapidement aux heures de pointe – la capacité de la route de contournement avait en fait été calculée de façon inadéquate. Pour tenter d’éviter les embouteillages, les automobilistes ont privilégié le centre du village où le TJM a enregistré, jusqu’en 2008, une hausse pouvant atteindre jusqu’à 10’000 véhicules par jour - une grande partie étant attribuable au trafic de transit.
La commune, quant à elle, avait été prévenante et, en vue de désengorger le centre de la localité, avait défini dans le plan directeur communal datant de 2001 son intention de mettre en valeur l’espace public. Il lui a ensuite fallu mettre en œuvre les actions planifiées pour remédier à la situation.
Chiffres clés
- Population de Cheseaux-sur-Lausanne: 4’300 (2018)
- Surface du site: environ 5’000 m2
- Coûts d’investissements: 2.84 millions CHF
- Trafic journalier moyen (TJM) avant/après: 10’000/6’000
- Niveau de qualité de desserte par les TP: B – bonne desserte
- Type de commune OFS: commune périurbaine de forte densité
Évaluation
Situation
Cheseaux-sur-Lausanne se situe à près de sept kilomètres au nord de Lausanne et à vingt minutes en train, en voiture ou en bus du chef-lieu vaudois. La liaison en bus est assurée par pas moins de six lignes. Atout majeur du village, la nouvelle zone de rencontre, qui a pris des allures de place du village, se trouve au cœur de la localité et constitue un espace animé et convivial qui accueille tous les visiteurs, quel que soit leur moyen de transport.
Les habitants bénéficient de la proximité de magasins et d’autres commerces qui couvrent de nombreux besoins alors que dans d’autres localité, il est souvent nécessaire de s’approvisionner hors du village. Dans un rayon de 200 mètres, les habitants disposent de deux boulangeries et de deux boucheries, d’une Coop, d’une pharmacie, ainsi que d’une succursale bancaire et d’un bureau de poste. De plus, la gare et la Maison de commune, une maison de retraite, une crèche-garderie, un établissement scolaire et des installations sportives sont également proches.
Commune
C’est la commune qui a été le véritable moteur de ce réaménagement, exigeant un travail de longue haleine. Pendant des années, elle s’est battue pour la réalisation de la route de contournement. Par la suite, elle a défini le réaménagement du centre du village dans son plan directeur communal et s’est dès lors engagée en faveur de sa valorisation.
La commune a également promu le développement du centre grâce à la rénovation de la gare – réalisée en 2002. En tant que propriétaire foncier, elle a fait construire, de 2011 à 2013, une crèche ainsi que des locaux extra-scolaires au centre du village. Ces projets témoignent de la volonté de la commune de consolider le cœur de la localité en menant une politique foncière active tout en favorisant l’animation.
Processus
Historiquement, le Conseil communal avait clarifié les conditions-cadre relatives à la valorisation de la traversée du village peu avant l’ouverture de la route de contournement. En 2001, il avait mandaté un avant-projet servant de base à un mandat d’étude. Sept candidats ont été invités, en 2007, à présenter leurs projets.
La commune a ensuite organisé quatre ateliers incluant les parties prenantes afin de les associer aux discussions sur le projet lauréat. C’est seulement après cette étape que le projet final a été élaboré et approuvé en 2013 par le canton. Finalement, les travaux ont été réalisés en 2015 après la mise à l’enquête publique et l’octroi du crédit de construction. Puis, ce fut le coup de théâtre…
En effet, alors que des représentants du canton s’étaient rendus sur place en 2015 pour découvrir le projet finalisé, il est apparu que la séparation entre la route et l’espace destiné aux piétons ne répondait pas aux conditions définies pour les zones 30: la hauteur minimale entre la route et le bord de la chaussée était insuffisante, des éléments en métal intégrés dans le sol marquaient en fait le bord de la chaussée. Soucieux de garantir la sécurité maximale des lieux, le canton a retiré l’autorisation délivrée pour la zone 30. Il s’est toutefois déclaré disposé à accepter le principe d’une zone de rencontre avec une limitation de vitesse à 20 km/h, donnant la priorité aux piétons.
Propriété
Le village est traversé dans son axe par une route communale. Les plans de mise en valeur du centre du village concernaient dès lors prioritairement la commune et impliquaient près de dix autres propriétaires fonciers.
Dans cette zone, les plans prévoyaient un réaménagement de tout l’espace, jusqu’aux façades des bâtiments, avec, comme conséquence, des emprises sur des terrains privés. Dans le cadre des négociations, les responsables du projet et le Conseil communal ont dû faire preuve de persuasion pour convaincre tous les propriétaires fonciers concernés de la plus-value et de l’utilité du projet. L’argument principal était la prise en charge par la commune des coûts relatifs aux mesures de réaménagement relatives aux propriétés privées.
Acceptabilité
Dans le cadre de quatre ateliers regroupant les principaux acteurs concernés, les commerçants, les propriétaires fonciers, les représentants de la population et le Conseil communal (législatif) ont pu faire valoir leurs idées et leurs préoccupations.
Si la population a largement soutenu le réaménagement, les commerçants et artisans ont, de leur côté, redouté que le changement de régime de circulation, combiné à la suppression de toutes les places de stationnement en surface, n’entraînent une diminution de la clientèle. À l’issue des débats, un accord a été obtenu: seules trois places de stationnement seraient supprimées et les autres déplacées. En contrepartie, le principe d’une zone 30 était accepté.
Compte tenu de la configuration des lieux, le canton a toutefois exigé une zone 20 et la commune a dû l’introduire. De nombreux restaurants et magasins se sont ainsi sentis trompés, inquiets à l’idée de perdre une partie de leur clientèle. Après que la commune ait introduit cette zone 20 à titre d’essai sur six mois, les commerçants ont constaté qu’au lieu de faire baisser les chiffres d’affaires, cette décision a eu pour effet de réduire les nuisances dues au trafic et au bruit.
Quant à l’acceptabilité de la zone 20 par les autres acteurs, le nouveau régime de circulation a quelque peu déstabilisé les écoliers du fait de l’absence soudaine de passages piétons. Un responsable de la sécurité routière a été chargé de familiariser les enfants aux nouvelles règles de circulation. Les automobilistes, quant à eux, ont été sensibilisés à la nouvelle donne grâce à un indicateur de vitesse. Aujourd’hui, cinq ans après le réaménagement, la population, les commerçants et les autorités sont satisfaits du résultat. Selon l’estimation du Syndic de la commune, la tolérance générale vis-à-vis des différents usagers de la route s’est considérablement améliorée.
Qualité
Depuis le changement en zone de rencontre, la désignation «d’artère de transit» ne correspond plus vraiment à la réalité. La route traverse désormais le centre du village tel un tapis rouge, interrompue par des bandes grises définies en fonction des constructions existantes; celles-ci structurent la chaussée d’un point de vue visuel et ralentissent le trafic.
Afin d’animer et d’améliorer la zone, des bancs ont été installés le long de la route, endroit idéal pour se reposer ou observer l’animation du centre-village. Des pots fleuris et des arbres nouvellement plantés viennent y ajouter une touche de couleur et devraient offrir de l’ombre dans quelques années. Tout un chacun peut profiter des niches et des petites places libres d’utilisation. Il ne fait aucun doute que la commune est parvenue à créer une zone de rencontre attrayante et fonctionnelle.
Densité
L’objectif principal du réaménagement n’était pas l’augmentation de la densité de la construction. La priorité était de réduire le trafic de transit et de créer un espace agréable pour tous les modes de transport et tous les usagers de la route. L’accroissement des formes de mobilité dans l’actuel centre du village prouve que le but a été atteint.
Le nombre de personnes qui se déplacent ou s’attardent dans le centre de la localité est en nette hausse, entraînant une diversification de la manière dont les gens s’approprient l’espace. Par exemple, les passants se sont mis à flâner, à s’asseoir sur les bancs et à y lire. La densité fonctionnelle et sociale a donc progressé par rapport au passé.
Rentabilité
Grâce à l’important processus de revalorisation engagé, la commune a investi environ 2.84 millions de francs afin d’offrir une infrastructure attrayante pour le présent et l’avenir. Les coûts de planification à eux seuls se sont élevés à quelque 650’000 francs, une part inhabituellement élevée, qui représente près d’un quart du montant total du projet entier. L’aménagement attrayant, la cohabitation plus respectueuse entre les usagers de la route et la diminution du niveau sonore sont autant de bénéfices pour la population et justifient ces dépenses. Au niveau financier, la commune a planifié un amortissement des investissements sur les trente prochaines années.
Résumé
Au début du processus de planification, l’intention de transformer la traversée du village en une zone de rencontre n’avait pas été envisagée sérieusement. Jusqu’à l’achèvement des travaux, l’idée avait été d’introduire une zone 30. C’est à la surprise générale que le canton a décidé de le refuser, autorisant uniquement une zone de rencontre. Rétrospectivement, la grande majorité des acteurs se félicite de cette décision puisqu’elle a permis la création d’un nouvel espace convivial qui s’apparente aujourd’hui à une place de village. Par exemple, le marché hebdomadaire s’y tient tous les vendredis et des manifestations plus importantes y sont organisées au moins quatre fois par année. Pour une commune de près de 5’000 habitants, il s’agit là d’une offre très diversifiée et d’un succès notable.
Points forts selon l’avis d’EspaceSuisse
- Grâce à l’étude préliminaire et au mandat d’étude, la commune a opté pour une voie qui lui a permis, en considérant plusieurs variantes d’aménagement, de trouver une solution individuelle.
- L’artère de transit n’est plus dévolue principalement à la circulation automobile mais prend désormais aussi en compte d’autres formes de mobilité.
- Le réaménagement de la traversée du village jusqu’aux façades des bâtiments a favorisé la création de nouveaux espaces qui peuvent être utilisés par la population à différentes fins.
- Le nouvel aménagement confère un rayonnement particulier au site et enrichit son identité de nombreuses nouvelles facettes.
Informations supplémentaires
- 2008. Mandat d’études parallèles. Rapport final. Commune de Cheseaux-sur-Lausanne.
- 2008. Les voitures étouffent le centre de Cheseaux. 24heures du 29 septembre 2008. Lausanne.
- 2014. Préavis N° 38/2014 du conseil communal. Commune de Cheseaux-sur-Lausanne.
- 2015. Plus de 7000 véhicules par jour traversent Cheseaux à 20 km. 24heures du 10 octobre 2015. Lausanne.
- 2018. Préavis N° 18/2018 du conseil communal. Commune de Cheseaux-sur-Lausanne.
Date de l'évaluation par EspaceSuisse: février 2020